La Chine prépare sa chute et les banques chinoises vont souffrir !
La chute de la Chine semble désormais inévitable. Alors que Evergrande n'est pas parvenu à payer les coupons de ses obligations “offshore” en début de semaine, suite à l'expiration du délai de grâce de trente jours qui avait commencé le 6 novembre, l'agence de notation Fitch a abaissé, jeudi 9 décembre, la note du géant chinois de l'immobilier à RD pour défaut restreint.
La note de défaut restreint signifie donc que la société a échoué à rembourser ses créanciers en temps et en heure sur une obligation importante.
Alors que jusqu’à maintenant, le géant immobilier parvenait à effectuer le paiement de justesse, l'agence de notation a expliqué que le promoteur immobilier, qui croule sous une dette de 300 milliards de dollars, n'a pas répondu à sa requête visant à confirmer qu'il avait bien payé les coupons et dont le montant s'élevait à 82,5 millions de dollars.
Curieusement, cela coïncide précisément avec l’annonce réalisée en début de semaine par la Banque centrale chinoise indiquant abaisser le ratio de réserves obligatoires qu'elle exige aux banques chinoises, ce qui libérerait environ 1.200 milliards de yuans, soit 188 milliards de dollars, dans le système financier.
Il s'agissait donc de la deuxième décision de ce type cette année en moins de cinq mois.
Quelle est la relation entre ces deux nouvelles ? Et pourquoi les banques chinoises pourraient souffrir ?
C’est précisément ce que nous allons voir dans cet article !
Table des matières :
1. Evergrande entre en défaut
C’est Fitch, qui est devenue la première agence de notation à déclarer que les obligations étrangères d’Evergrande étaient en défaut après que le promoteur immobilier le plus endetté au monde n'a pas effectué un paiement d'intérêt cette semaine.
Cette annonce marque donc un moment décisif dans cette aventure que l’on suit maintenant depuis plusieurs mois et dont plusieurs vidéos ont été dédiées afin que vous puissiez tout comprendre, d’un point de vue économique et les politiques mises en place par la Chine d’une part, et d’autre part d’un point de vue financier, puisque j’avais analysé le bilan et le compte de résultat du géant immobilier.
Cette déclaration de défaut a donc alimenté les inquiétudes mondiales quant à l'impact potentiel sur l'économie chinoise après avoir manqué une date limite pour rembourser les intérêts d’une partie de sa dette pour un montant de 82,5 millions de dollars.
Si on reprend le calendrier que nous avions vu dans une précédente vidéo, on voit que ces intérêts devaient être acquittés le 6 novembre dernier, la transaction n’ayant pas été effectuée, un moratoire d’un mois avait été décrété avant de déclarer le défaut de paiement.
Or, il s’agit de la première fois que le géant immobilier ne parvient pas à respecter ses engagements, malgré une prorogation d’un mois, puisque jusqu’à maintenant, le règlement était effectué de justesse.

Ainsi, depuis janvier, les actions de l’entreprise ont chuté de près de 90% !

Si pour le moment, ni la société, ni le gouvernement chinois n'ont confirmé le défaut, deux données suggèrent fortement que la Chine se prépare à la faillite de Evergrande.
1)Tout d'abord, la première donnée a trait à la déclaration du groupe Evergrande lui-même, annonçant qu'il allait très probablement faire défaut.
Ainsi, un communiqué publié sur son site internet indiquait que : “Étant donné l’état actuel des liquidités du Groupe, rien ne garantit que le Groupe disposera de fonds suffisants pour continuer à s'acquitter de ses obligations financières”.

Autrement dit, le géant immobilier préparait déjà le marché à un défaut imminent.
D’ailleurs, Fitch a également déclaré jeudi que Kaisa, un autre développeur lourdement endetté qui n'a pas remboursé une obligation de 400 millions de dollars arrivée à échéance mardi, entrait en défaut restreint.
2) Ensuite, la deuxième donnée concerne deux récents mouvements de la part de la Banque centrale chinoise.
Non seulement cette dernière a annoncé que pour la deuxième fois cette année, elle allait abaisser le ratio de réserves obligatoires des banques, mais en plus, elle a décidé d'augmenter le ratio des réserves obligatoires de change des banques.
Ainsi, d’une part, en diminuant le ratio des réserves obligatoires, la Chine souhaite lâcher plus de liquidités et d’autre part, en augmentant le ratio des réserves obligatoires mais de change, cette fois-ci, le parti souhaite lutter contre l’appréciation du Yuan par rapport au dollar.

Ces deux mesures auraient donc pour vocation de relancer la croissance économique du pays, qui, comme nous l'avions vu dans une vidéo précédente, est en constante chute depuis plusieurs années.
2. La Chine et la crise de liquidité
Toujours est-il qu’il est possible de faire une autre interprétation !
En effet, avec le défaut de Evergrande et d’un autre promoteur appelé Kaisa, on peut légitimement penser que la Banque centrale chinoise abaisse le ratio de réserves obligatoires afin de minimiser le risque de crise de liquidité face à l'effondrement de l’immobilier.
Pour se faire une idée de l'ampleur du problème économique et financier auquel la Chine pourrait être confrontée, il faut savoir tout d’abord que la valeur de l’ensemble des biens immobiliers en Chine, selon Goldman Sachs, s'élevait en 2019 à 52.000 milliards de dollars, soit près de 20 fois le PIB de la France.

Ensuite, en 2017, et il y en a probablement plus aujourd'hui, il y avait 65 millions de logements vacants en Chine, soit un logement existant sur cinq, c’est-à-dire, 20% de tous les logements dans le pays.
À titre d’exemple et en guise de comparaison, en France, d’après les dernières estimations de l’Institut National des Statistiques et des Études Économiques, sur les 37,2 millions de logements, il y avait un petit peu plus de 3 millions de logements vacants, ce qui représente environ 8,3%.
Pour faire simple, le nombre de logements vides en Chine représente près de deux fois le parc immobilier français. Cela signifie qu'il y aurait suffisamment de maisons vides en Chine pour loger l'ensemble de la population française. Une seule et unique personne dans un seul et unique logement.
En ce sens, dans la mesure où les maisons vides représentent environ 20% de l'ensemble du parc immobilier en Chine et que l'ensemble de ce parc immobilier a une valeur de 52.000 milliards de dollars, alors on peut estimer que la valeur de l'ensemble des maisons vides est d'environ 10.400 milliards de dollars.
3. Comment est-on arrivé à cette situation?
Arrivé à ce stade, on peut donc légitimement se demander, comment la Chine a-t-elle pu arriver à une telle situation.
En fait, pour plusieurs raisons :
1) La première, c’est que les perspectives du marché immobilier chinois sont ou étaient raisonnablement bonnes durant plusieurs années dans la mesure où le taux d’urbanisation, c'est-à-dire la part de la population chinoise vivant dans les villes, est d’environ 60%. Évidemment et mécaniquement, cela signifie que 40% de la population vit à la campagne.
À titre d’exemple, en France, le taux d’urbanisation tourne autour des 80%.

Par conséquent, si la migration de la campagne vers la ville se poursuit, il faudra s'attendre à ce que de nombreux logements soient nécessaires en Chine afin d’être occupés par les Chinois migrants de la campagne vers la ville.
Dès lors, et tout naturellement, dans un tel contexte, il peut sembler logique d'investir dans l’immobilier et construire de nouveaux logements, même s’ils sont inhabités durant une certaine période, dans la perspective de les vendre ou de les louer dans le futur, avec l'arrivée de nouveaux habitants.
2) Deuxièmement, et comme nous l'expliquions dans une vidéo précédente, depuis 2008, la Chine a basé sa croissance économique sur l'hyper endettement et sur le crédit facile dont une grande partie s’est tout naturellement infiltrée dans le marché immobilier, gonflant d’autant plus la bulle déjà existante.
Comme on peut le voir sur ce graphique, la bulle immobilière en Chine est de loin la plus grosse, loin devant la France, les États-Unis, le Japon, l’Irlande ou encore l’Espagne, ces 5 pays ayant connu une bulle immobilière dans les années 90 ou 2008.


3) Et finalement, précisément parce qu’au travers de la stimulation de l’endettement des ménages, une vague spéculative a été créée.
Compte tenu de toutes ces données, une partie de l’épargne présente ou future des ménages, c’est-à-dire, au travers de l’endettement, est allée se loger dans l’immobilier.
Comme on peut le voir, l’endettement chinois ne cesse de croître.


Or, pour que ce système puisse continuer, il faut que la croissance économique et l’urbanisation de la chine se poursuivent dans la mesure où il existe une relation particulièrement étroite entre la croissance économique d’une part et l'augmentation de la population dans les villes, d’autre part.

De ce fait, si la Chine ralentit, moins de personnes iront de la campagne vers les villes, diminuant la demande de logements. Si la demande de logement diminue à cause d’une baisse de la demande, alors l’endettement privé pour acheter de l’immobilier pourrait également ralentir, ne faisant qu’amplifier l’impact sur la vente de logements.
De ce fait, comme on l’a vu précédemment, si la demande n’augmente pas autant que prévu, pour ces différentes raisons, ne coïncidant pas avec l’offre, alors, on assisterait à une multitude de facteurs pressionnant à la baisse les prix immobiliers en Chine.
Le problème c’est que 30% du PIB de la Chine dépend de l’immobilier !

La situation devient donc particulièrement bancale, synonyme d’un vrai système pyramidale, où le raisonnement est le suivant :
On va grandement développer le parc immobilier pour stimuler la croissance économique, pour cela, il faut vendre des maisons, sauf que les acheteurs n’ont pas nécessairement les moyens, donc pour y remédier, il faut leur avancer les moyens financiers au travers de l’endettement. Cet endettement génère une hausse de la demande, ce qui stimule à nouveau la construction de biens, poussant d’autant plus la croissance économique, générant de nouvelles opportunités et de l’emploi afin de sortir de la pauvreté, incitant les personnes vivant dans la campagne à migrer vers la ville, générant une demande supplémentaire, ce qui permet d’accroître les stimulations financières, et ainsi de suite.
Évidemment, à un moment donné, cette pyramide de Ponzi est susceptible de s'effondrer et tous les facteurs ayant participé de près ou de loin à son développement pourraient se renverser si les ventes venaient à diminuer.
En effet, une baisse des ventes, freine la construction de nouveaux biens, ce qui impact nécessairement la croissance économique, l'urbanisation de la population chinoise stagne, le crédit est restreint, donc encore moins de maisons sont vendues, continuer de construire des biens n’a plus nécessairement d'intérêt et donc la croissance économique ralentit davantage.
En ce sens, si l’on part du principe que la valeur totale de l’immobilier en Chine tourne autour de 52.000 milliards de dollars, et la valeur totale des maisons vides est de 10.400 milliards de dollars, si ces maisons vides ne se vendent pas, l’éclatement de la bulle est susceptible de faire chuter, à la fois la valeur des maisons vides, mais aussi, dans une plus ou moins grande mesure, celle des maisons occupées.
4. Les banques chinoises en danger
Sauf que ce n’est pas tout, car il nous faut également prendre en compte une autre donnée : il s’agit du secteur bancaire chinois.
Les actifs du secteur bancaire chinois s'élèvent à 336.000 milliards de yuans, ce qui équivaut à environ 52.000 milliards de dollars.

Et d’après Citigroup, environ 41% de ces 52.000 milliards de dollars d’actifs, soit environ 21.000 milliards de dollars sont directement ou indirectement liés au secteur immobilier chinois.
En d'autres termes, si le secteur immobilier chinois venait à s'effondrer, les pertes potentielles pour les banques chinoises pourraient atteindre les 21.000 milliards de dollars, même s’il est pratiquement impossible qu’il y ait une chute de 100%.
Et quel est le montant des capitaux propres des banques chinoises pour supporter une chute du secteur immobilier ?
Eh bien il est de seulement 28.000 milliards de yuans, c’est-à-dire, environ 4.500 milliards de dollars.

En d'autres termes, une chute équivalente à environ 20% de l’immobilier dont les banques chinoises sont exposées conduirait à immédiatement à la faillite des banques chinoises.
5. Une récession de bilan en vue?
Évidemment, beaucoup de personnes estiment que cette situation ne se produira pas car le gouvernement chinois interviendra avant afin de l'éviter, soit en recapitalisant les banques, soit en freinant les transactions immobilières pour éviter une baisse des prix.
Certes, cela pourrait arriver, toujours est-il que même si le prix des biens immobiliers ne baissent pas, dû justement à cette impossibilité de réaliser des transactions, les investisseurs seront conscients que le portefeuille d'actifs des banques n’est pas à sa valeur de marché.
Ainsi, si ces dernières venaient à devoir liquider tout ou partie de leur portefeuille d'actifs pour rembourser leurs dettes, elles ne seraient pas en mesure de le faire et on assistera à une divergence entre d’une part, la valeur comptable du portefeuille qui est artificiellement valorisé à la hausse par le gouvernement, et d’autre part, la valeur de marché du portefeuille qui lui, a chuté.
Pour faire simple, une telle situation serait susceptible de provoquer ce que l’on appelle en finance, une récession de bilan.
C'est-à-dire que bien que les banques ne soient pas officiellement en faillite, puisque la valeur comptable de leurs actifs est toujours égale à la valeur de leurs passifs et donc leur fonds propres sont toujours positifs, en réalité, la valeur de marché de leurs fonds propres est négative et donc officieusement, elles sont en faillite.
C’est donc précisément à cet instant que la crise de liquidité dont on vient justement de parler pourrait se déclencher.
Ainsi, si Evergrande n’est pas sauvé, ce qui est probable puisque comme j’en avais parlé dans une précédente vidéo, plusieurs indicateurs nous poussent à penser que le gouvernement ne le sauvera pas, ce qui semble se produire puisque le géant immobilier vient de faire défaut sur le remboursement d’une de ses dettes, et que sa faillite provoque une explosion de la bulle immobilière chinoise, alors, la valeur de l’immobilier en Chine pourrait commencer à s’effondrer.
Peu importe donc que le gouvernement permette que les transactions puissent ou non se réaliser afin de refléter les conditions réelles du marché comme nous venons de le voir.
Auquel cas, des doutes pourraient commencer à émerger concernant la santé du système financier chinois conduisant à un potentiel retrait de liquidités.
Et comment contrer cette éventuelle fuite de liquidités de la part des créanciers du secteur financier chinois ?
Eh bien justement, en diminuant les réserves obligatoires des banques chinoises et en augmentant les réserves obligatoires de changes : précisément ce que la Banque Centrale est en train de mettre en place.
Ainsi, seul l’avenir nous dira ce qu’il adviendra.
6. Voir la vidéo